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Michaël Merrigan,
attaché-juriste à l’Institut Fédéral pour la protection et la promotion des Droits Humains (FIRM-IFDH)
La DUDH, un levier important pour l’avenir
La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) a été adoptée en 1948. À cette époque, les Nations Unies comptaient 58 membres. 48 d'entre eux ont voté pour la déclaration, huit se sont abstenus (ceux appartenant au bloc communiste : l'Union soviétique, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Biélorussie et l'Ukraine, ainsi que la Yougoslavie, l'Arabie saoudite et l'Afrique du Sud). Ces pays avaient tous des raisons politiques de ne pas voter pour (et deux, le Honduras et le Yémen, n'ont pas voté) mais il est intéressant de noter qu’aucun pays n'a voté contre.
La DUDH en tant que telle n’est pas une source contraignante de droit international. Néanmoins, les normes qu’elle contient peuvent être trouvées dans d’autres instruments, qui sont contraignants. De plus, ces normes sont considérées comme faisant partie du droit international coutumier. À l’heure actuelle, la DUDH est sans doute le symbole principal de la volonté de faire des droits humains un point cardinal de l’après-guerre.
Les critères pour consacrer un droit
Depuis l'adoption de la DUDH, le monde a radicalement changé. Cela soulève la question suivante : si nous devions reformuler la déclaration, quels droits voudrions-nous y ajouter ?
L'une des grandes évolutions au cours de cette période tient au fait que nous ne pouvons plus ignorer la crise climatique mondiale, ni la menace globale qui pèse sur notre environnement. Supposons que nous puissions réécrire la DUDH, devrions-nous consacrer « officiellement » un droit humain à un environnement sain et à un climat vivable dans un texte-instrument international ?
Dans ce contexte, il est intéressant de mentionner que l'Assemblée générale des Nations Unies dans une résolution de 19861, a dressé une liste de critères auxquels doivent répondre des nouvelles normes, dites de « droits humains », pour être consacrées par le droit international. Selon cette résolution, un droit nouveau doit respecter certains principes communs à l’ensemble des droits fondamentaux : la cohérence avec les normes existantes en matière de droits humains ; Le caractère fondamental du droit reconnu, procédant de la dignité et de la valeur inhérentes à la personne humaine ; la précision suffisante du contenu du droit pour que les droits et obligations en découlant puissent être définis et mis en pratique ; l'existence de mécanismes d’application réalistes et efficaces.
Sur la base de ces critères, il ne semble pas exclu qu'un droit à un environnement sain et à un climat vivable puisse trouver sa place dans une « Déclaration Universelle 2.0 ». De nombreux développements se produisent d’ailleurs dans ce domaine, par exemple la résolution 48/13 du 8 octobre 2021 du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, dans laquelle le Conseil a reconnu un « droit à un environnement propre, sain et durable ».
Un droit ou (aussi) un devoir ?
Or, un tel droit ne peut avoir de sens que s’il est accompagné par des mesures concrètes prises par les États, les entreprises et d'autres acteurs, y compris les individus.
Il est bon de continuer à réfléchir sur ce que les droits humains signifient pour nous aujourd'hui.
Peut-être, devrions-nous modifier l'article 29 de la DUDH ? Cet article dispose que « l'individu a des devoirs envers la communauté dans laquelle seul le libre et plein développement de sa personnalité est possible ». On peut imaginer de compléter cet article par une responsabilité individuelle et collective envers la planète et les générations futures. En effet, tant que les devoirs et les responsabilités sont abordés avec prudence, c'est-à-dire d'une manière qui ne porte pas atteinte aux droits humains, une telle approche présente l'avantage de se concentrer sur ce qui doit réellement être fait pour que les droits humains deviennent une réalité.
Il est bon de continuer à réfléchir sur ce que les droits humains signifient pour nous aujourd'hui.
À cet égard, imaginer comment nous pourrions réécrire la DUDH est un exercice intéressant. Toutefois, nous ne devons pas perdre de vue que nous devons avant tout respecter les droits qui ont été établis dans la DUDH il y a presque 75 ans. Et là aussi, comme nous le savons, le travail ne manque pas.
- Établissement de normes internationales dans le domaine des droits de l’homme, A.G., 41e sess., A/RES/41/120, 04.12.1986, §4.