• Bénédicte Dochain
    Bénédicte Dochain
    bibliothécaire-directrice du centre de ressources du B3
Propos recueillis par Grégory Pogorzelski

Le B3 un centre de ressources et de créativité moderne

Un nouveau bâti­ment, le B3, a surgi de la friche de Bavière. Il remplace depuis plus d’un an l’ancienne biblio­thèque des Chiroux. Mais ses archi­vistes ne se sont pas conten­tés de dépla­cer des vieux livres : ils déve­loppent des projets qui attirent déjà les foules.


Salut & Frater­nité : Le B3 n’est pas juste un lieu d’archivage : quel était le projet au départ ?

Béné­dicte Dochain : C’est tout un projet qui s’inscrit dans le programme euro­péen du FEDER. L’enjeu, c’est de revi­ta­li­ser la ville. Au départ, le projet devait se faire sur l’ancien site des Chiroux, mais il n’a pas été retenu. Des conver­gences se sont faites avec la ville et le projet Bavière, et ce nouveau projet a, lui, reçu le feu vert. Au-delà d’une biblio­thèque avec un service de lecture publique, il y a des enjeux de remise à l’emploi, d’accès et d’accompagnement aux nouvelles tech­no­lo­gies. Le B3 propose égale­ment un explo­ra­toire des possibles, avec des outils numé­riques et des collègues qui sont formés à l’accompagnement. Ils servent aussi à redi­ri­ger les usagers vers d’autres ressources, d’autres réseaux. Sans comp­ter le volet « pépi­nière d’entreprises », plus écono­mique. Ce démé­na­ge­ment a enfin permis à la biblio­thèque de revoir tout son projet scien­ti­fique et cultu­rel, et de l’orienter dans un esprit "3e lieu". Un lieu entre le travail – ou l’école – et le domi­cile, où les gens passent du temps, échangent, discutent… et ne viennent pas simple­ment prendre ou rendre des docu­ments. C’était ça, notre défi.

Ce démé­na­ge­ment a enfin permis à la biblio­thèque de revoir tout son projet scien­ti­fique et cultu­rel, et de l’orienter dans un esprit "3e lieu".

S&F : Défi relevé ? Quel est le bilan, après un an d’activités ?

B.D. : Au-delà de nos espoirs ! Nous avions prévu envi­ron mille personnes par jour, dans le meilleur cas. Malgré la crise sani­taire et ses consé­quences, nous avons dépassé cet objec­tif presque quoti­dien­ne­ment. Et en période d’examens, en un seul mercredi, nous avons accueilli 7 300 usagers dans le bâti­ment. Ce qu’on constate aussi au-delà des chiffres, c’est le temps passé sur place. Le public s’installe, prend le temps d’ouvrir un livre et de le lire sur place, d’échanger avec d’autres personnes. Les gens viennent étudier, travailler en groupe ou prendre et essayer un jeu de la ludothèque.

S&F : Comment s’insère le B3 dans la poli­tique cultu­relle plus large de la Province ?

B.D. : C’est un projet-phare. Après la réfec­tion du Musée de la Vie wallonne, il y avait une volonté de redy­na­mi­ser à la fois les Chiroux et les services de lecture publique. Mais aussi d’aller plus loin, comme le déve­lop­pe­ment des pratiques langa­gières. Nous avons cette volonté d’offrir à tout le monde le plus de moyens possibles pour appré­hen­der la langue, la mani­pu­ler. Permettre à tous de maîtri­ser la langue, c’est permettre de se sentir vrai­ment citoyen : de parta­ger, de parti­ci­per à la Cité. Il y avait vrai­ment cet enjeu d’un accom­pa­gne­ment des nouvelles technologies.

© Province de Liège

S&F : Et pour l’avenir ?

B.D. : On touche beau­coup plus de jeunes, depuis qu’on est ici au B3. Est-ce le lieu, l’espace, la lumière, ou l’envie d’être un peu coupé des distrac­tions ? On voit des groupes, des rencontres… On se demande quelle est le meilleur accom­pa­gne­ment à appor­ter à ce public, comment déve­lop­per notre travail avec ce public, lui faire décou­vrir les ressources dispo­nibles. Comment trou­ver des docu­ments, faire une recherche critique, déco­der les sources, repé­rer les fake news, utili­ser des bases de données fiables, etc. Il existe toute une pano­plie de ressources mécon­nues, souvent éclip­sées par Google et autres. On conti­nue à ouvrir le lieu vers l’extérieur, le public, les autres institutions.

Nous travaillons aussi sur le gaming comme médium légi­time, et nous avons eu plusieurs succès de foule avec des événe­ments autour de ce thème. Nous voulons le déve­lop­per plus, avec des soirées gaming et jeux de société. Ce sont aussi d’excellents supports pour déve­lop­per la créa­ti­vité. On voudrait mettre en valeur les jeux déve­lop­pés par la scène locale ou propo­ser de travailler la narra­tion non linéaire avec les jeux vidéo ou de société comme support. On voudrait dépas­ser cette idée qu’une biblio­thèque, ce sont des livres et des revues. Multi­plier les supports, amener vers la créa­tion artis­tique avec notre arto­thèque et nos liens avec les acteurs liégeois du milieu. Enfin, la Province a pour projet de promou­voir la filière du livre et de ses métiers. Sont prévues des rencontres avec les libraires, les auteurs, les éditeurs ; des publi­ca­tions, des ateliers d’écriture, des cercles de lecture et bien d’autres activités.

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